mercredi 6 mai 2009

Persona 4, interview avec Shoji Meguro

C'est la semaine dernière qu'est sorti au Japon le remake sur PSP du premier Persona, publié par Atlus. Pour la première fois, le compositeur Shoji Meguro est en charge de la réalisation. En ce début mai sort également, en Amérique cette fois, le nouvel épisode de la série Devil Summoner, Raidô Kuzunoha VS. King Abaddon. La bande originale est composée par Meguro lui-même. En août de cette année, trois morceaux de Persona 4, écrits par le compositeur, figureront au programme du concert Press Start: Symphony of Games au Tokyo Metropolitan Art Space à Ikebukuro. Dans cette interview, Shoji Meguro revient sur Persona 4, et tout particulièrement sur l'utilisation des chansons à la fois dans les cinématiques et les combats, ainsi que sur le rôle joué (ou non) par le scénario du jeu.

Interview réalisée par Jeriaska, traduite par Ryojiro Sato. Le texte est disponible en anglais sur GameSetWatch, en italien sur Gamesource.it et en japonais sur Game Design Current.

M. Meguro, merci de vous joindre à nous pour discuter de la bande originale de Persona 4. Shin Megami Tensei: Devil Summoner 2 va bientôt sortir en Amérique. La bande originale joue-t-elle un rôle essentiel dans la création de l'ambiance de l'ère Taishô, au début du XXème siècle au Japon ?

Shoji Meguro : Les musiques de la bande originale ne visent pas toutes à représenter l'ère Taishô, à travers des instruments traditionnels japonais ou des mélodies spécifiques. La série Raidô dispose d'une atmosphère unique, et quand j'ai réfléchi aux musiques, j'ai voulu correspondre à cette atmosphère.

Dans le thème d'ouverture, c'est le shakuhachi qui permet de définir la période. Il s'agit d'une flûte en bambou à embouchure libre. Je crois que pour la plupart des gens, elle produit un effet immédiat. Je trouve que cet instrument seul suffit à reproduire l'atmosphère de l'ère Taishô.


Certains sites tels que Gamasutra et Kotaku ont décelé la thématique de la personnalité refoulée dans Persona 4. Cette thématique semble évoquée dans les titres des pistes, "Pursuing My True Self" et "Reach Out To The Truth". Avez-vous délibérément cherché à refléter le leitmotiv de l'aveuglement à son propre égard ?

On peut dire qu'il existe un lien entre la logique absolue et la bande originale de Persona. A propos de mon travail en tant que compositeur, le thème d'ouverture "Pursuing My True Self" m'a d'une certaine manière aidé à souligner la psychologie des personnalités explorées par la bande originale.

Si en apparence, les protagonistes se conduisent calmement, en réalité ils sont en conflit. Le thème de combat "Reach Out To The Truth" exprime la forte détermination de ces personnages alors qu'ils cherchent à triompher de leurs conflits intérieurs.

"Reach Out To The Truth" sert d'accompagnement aux combats à l'intérieur du Midnight Channel. La chanson fera partie du programme du concert Press Start: Symphony of Games, une première pour la série. Comment avez-vous travaillé avec la chanteuse Shihoko Hirata pour insuffler autant de dynamisme émotionnel dans la chanson ?

J'ai commencé par chercher une chanteuse capable de représenter le contexte de Persona 4, et c'est comme cela que j'ai rencontré Shihoko Hirata. Sans aucune hésitation, j'ai été convaincu que Mme Hirata devait faire du projet. En ce qui concerne le résultat dans la bande originale, j'ai pu lui faire confiance et ainsi lui laisser exprimer le degré d'émotion très difficile que la chanson exigeait.

En écrivant "Pursuing My True Self", connaissiez-vous les éléments de l'histoire tournant autour d'un mystérieux assassinat ou bien des conflits intérieurs des personnages ?

J'ai écrit la musique de l'ouverture avant, mais j'avais bien reçu un aperçu très schématique du scénario. Pour cette raison, composer une bande originale ressemble à l'écriture d'une histoire. D'abord, il faut absolument avoir en tête l'impression générale, puis ensuite s'intéresser aux petits détails tels que la mélodie de chaque piste. Personnellement, je bâtis un cadre pour me guider dans mon avancée. Ce n'est qu'ensuite que je commence à composer. Les petits détails s'ajoutent en même temps que l'histoire se développe, et que les dialogues parlés sont enregistrés.

La bande originale semble avoir été encore mieux accueillie que ce qui était attendu. Comment expliqueriez-vous le succès de cet album ?

Quand le moment est venu de publier l'album, une très grande attention a été apportée à chacune des pistes. Les chansons, en particulier, ont été corrigées pour que la balance soit optimale. La masterisation a été optimisée pour l'enregistrement en 24 bit/48 kHz.


Qui a écrit les paroles de ces chansons ?

C'est le travail de Reiko Tanaka. Nous avons travaillé sur trois chansons ensemble depuis Persona 3. Ses paroles en anglais sont excellentes.

Selon une interview dans le magazine Play, votre première piste pour Atlus était "Aria of Soul", le thème de la Velvet Room du premier Persona. Comment avez-vous conçu le remix de la chanson dans la bande originale de Persona 4, publiée par Aniplex Records au Japon, et comment aimeriez-vous arranger la piste à l'avenir ?

"Aria of Soul" se retrouve sous la même forme dans Persona 3 et 4. J'ai trouvé que la chanson avait été très bien reprise dans le précédent épisode. C'est pour cela que les prochains arrangements devraient être similaires en terme de structure. J'ai une petite idée pour les prochaines évolution du thème, mais c'est encore un secret. (rires) "Electronica in Velvet Room" a été ajoutée dans la bande originale en tant que piste bonus, elle n'a donc aucun lien avec le jeu.

Pour conclure, vous avez dit dans une précédente interview que vous avez étudié la construction mécanique à l'université. Cette formation a-t-elle bénéficié à votre travail dans le domaine de la musique électronique ?

Jusqu'à mon arrivée à l'université, je savais que je voulais devenir scientifique (au lycée, je m'étais concentré sur les mathématiques et la science), et je m'intéraissais beaucoup à la technologie. A l'époque, je trouvais cela naturel que cet intérêt concerne aussi les instruments de musique électronique.

Pour quelqu'un qui s'intéresse à la composition pour les jeux vidéo, c'est un avantage certain de se retrouver dans un bâtiment rempli d'ordinateurs. En ce sens, mon expérience de la programmation depuis le lycée a été extrêmement utile.

[Images : Atlus. Vous pouvez acheter la bande originale de Persona 4 en import sur Amazon.co.jp.]

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Cool l'interview, mais je saisi pas la dernière phrase.

Il insinue qu'il à eu plus de facilités à se rapprocher du groupe de développeur pour créer ses musiques qu'un compositeur classique au Japon ?

Ce qui signifierai donc que les compositeurs là-bas sont traités " à part " dans la conception d'un jeux vidéo ?

Jérémie a dit…

Depuis longtemps les compositeurs de VGM sont favorisés s'ils ont des compétences en programmation et en utilisation de la MAO. A mon avis, c'est ce qu'il veut dire, qu'il a eu moins de mal à se vendre en misant la carte de la spécialisation dans l'informatique...